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509 manifestations à Montréal en 2012. Le pouvoir est-il désormais sous les pavés ?

509 manifestations à Montréal en 2012. Le pouvoir est-il désormais sous les pavés ?Dressant récemment le bilan de l’année 2012, le patron de la Sécurité du Québec relève un chiffre : Rien qu’à Montréal, au cours des douze mois considérés, on a dénombré 509 manifestations de protestation populaire.

De prime abord, on pourrait penser que les protestations étudiantes – qui se sont régulièrement poursuivies du printemps jusqu’aux élections législatives de l’automne – sont à l’origine de ce chiffre assurément conséquent. Mais c’est faux; la colère des étudiants face à la perspective d’une hausse des frais de scolarité s’est exprimée à 84 reprises seulement, soit donc seulement 16% des mouvements d’humeur populaire enregistrés durant l’année. Autrement, alors qu’on n’y prenait garde, pour chaque manifestation estudiantines, cinq autres avaient lieu, souvent dans l’indifférence médiatique et par conséquent à l’insu (ou presque) du grand public.

Quand aux motivations du mécontentement ainsi traduit, on trouve de tout : des revendications insatisfaites de nature syndicales, des raisons politiques, des dénonciations de la corruption, des causes sociales ou environnementales, etc.

On a beau être originaire d’un pays où, avec l’ouverture démocratique, protester publiquement  est devenu, – avec notamment une manifestation des diplômés chômeurs qui se poursuit sans discontinuer depuis plus de vingt ans avec une occupation du parvis du parlement – un style de vie plus qu’une liberté irrépressible et un droit constitutionnel; le nombre n’en reste pas moins impressionnant.

Et qui ne laisse pas d’inquiéter…

Car les accrocs à la paix social que l’on appelle manifestations représentent des coûts d’une part et, surtout, ils ont une signification que l’on oublie souvent d’explorer.

Les coûts de la colère populaire

Un coût financier tout d’abord.

Pierre Duchesne, ministre de l’enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, estimait tout récemment que le bilan matériel des manifestations contre la hausse des coûts de scolarité s’était établis à 90 millions de dollars. En simplifiant le calcul, on peut donc dire que chaque événement aura «consommé» environ 100.000$.

Particulièrement spectaculaires, parfois violentes, les sorties des étudiants auront sans doute été plus onéreuses que n’importe quelle autre; mais la différence, tout coûts confondus (journées de travail perdues, manques à gagner pour les entreprises et les administrations, sécurité, nettoyage des lieux etc.) n’est sans doute pas bien grande. Toujours pour simplifier le calcul, considérons que chaque manifestation occasionne une dépense de l’ordre de 50.000 $.

En tout dès lors, l’année 2012 aura engendré à ce chapitre, des dépenses de l’ordre de 250 à 300 millions de dollars. En ces temps de restriction budgétaire, c’est beaucoup; c’est énorme. Obligé de rogner y compris sur les programmes sociaux constituant la marque de fabrique du Québec, n’importe quel gouvernement, passé, présent ou à venir, aurait sans doute trouvé meilleur usage à faire des cette manne.

Péril en la demeure

Le moindre des coûts reste cependant le coût financier.

Car, dans la vie d’une Nation, il pire que de perdre de l’argent.  Voir se déliter les relations de confiance entre une population et sa classe politique, regarder s’éroder le respect des institutions et de leur fonction est en effet autrement plus grave et chargé de périls. Car on entre ainsi dans une spirale pernicieuse dont le fait que la manifestation publique, d’ultime recours de citoyens lésés, devienne, avant même la grève,  la première – voire l’unique – expression d’insatisfaction, n’est que la première marche.

Mais qui est responsable d’une évolution, si dangereuse, des mœurs civiques?

Les politiciens qui, peut-être, ne savent plus écouter et entendre les insatisfactions populaires; ou les citoyens qui, avec le sens de la responsabilité collective, perdent aussi l’usage des voies et moyens plus premiers de la démocratie participative : l’engagement politique et l’exercice du droit de vote?

Question délicate; réponse improbable dans tous les cas. Sauf à appeler, encore une fois, à un nouvel esprit civique ou à un esprit civique renouvelé, par lequel nous serions plus nombreux que jamais par le passé, participer effectivement au choix de ceux qui, en novembre prochain, seront désignés par nous tous, à gérer notre degré premier de citoyenneté, la fonction municipale; et auxquels, avant même le vote, par notre participations aux débats et rencontres pré-électoraux, nous aurons fixé les priorités et les actions que nous les chargerons de mener, en notre nom et pour notre compte.

Abdelghani Dades (Edito Atlas.Mtl 199 du 14 au 27  février 2013)

 

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