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Maman est morte et « ils » parlent de son foulard

FRANÇOIS BUGINGO

FRANÇOIS BUGINGO

Un jour, il faudra leur dire. Quand ils grandiront, il faudra leur expliquer.

Nous leur devons ça. Nous leur devons collectivement des explications et un sincère mea culpa.

Deux bambins orphelins d’une maman brutalement décédée de la plus cruelle des manières, un matin banal dans un métro de Montréal. Les nuits hivernales seront désormais plus froides sans une maman pour les réchauffer de son souffle doux et de ses caresses patientes.

Il aurait fallu ajouter nos larmes aux leurs, leur tenir la main affectueusement en attendant que le sommeil succède à leurs sanglots.

Et à la place, ils ont plutôt entendu le troupeau vociférant et ricanant de ceux-là imbus de leur charte « règle-tout », gonflés de leur obscène satisfaction d’avoir « démontré » (sans attendre l’enquête de la police) que non seulement le hidjab asservit, mais en plus il tue. Indécents, exubérants, ils ont vomi leur crasse imbécilité à toutes les tribunes disponibles.

Quelques journalistes et chroniqueurs ont condamné ces propos. D’autres, dont ceux qui militent habituellement pour la charte ont opportunément détourné leur regard. Je ne les ai pas entendu dire : « Pas ces stupidités, pas en notre nom, pas au nom de la charte. »

Richard Martineau et Mathieu Bock-Côté se sont à point nommé intéressés par les questions d’économie, Joseph Façal regarde le Super Bowl, Pierre Foglia  fait du Foglia, etc. Pas le temps de pondre un papier pour dire « Ce n’est pas pour décomplexer des idiots comme ça que nous appuyons le projet de charte! »

Pas un mot du ministre de la Charte pour dire « J’ai honte, ce n’est pas ce Québec là que je souhaite bâtir avec mon projet. »

Pas un mot de la première ministre pour affirmer que « Le Québec dont je rêve ne peut tolérer qu’une citoyenne dévouée à sa communauté soit outragée par des concitoyens se revendiquant d’un de mes projets majeurs pour la société ».

Une femme est morte, des enfants sont orphelins, une famille et des amis sont dans la souffrance, rien à dire, circulez, rien d’important, après tout ça arrive tous les jours.

C’est ainsi que, chaque jour, nous perdons un peu plus de notre humanité. Qu’en pensant faire avancer notre civilisation (« Égalité, liberté, modernité! », vociférons-nous), on la rapproche d’une indigne cruauté que je refuse de qualifier de bestiale (car les bêtes ont parfois une conscience éthique).

Plus urgent que des lois et des chartes, me semble-t-il, c’est d’une rééducation éthique, philosophique et humanitaire dont notre société aurait besoin.

Car, un jour, il faudra leur dire. Quand ils grandiront, il faudra leur expliquer. Nous leur devons ça. À ces deux gamins désormais orphelins…

FRANÇOIS BUGINGO 

 

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