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Montréal : La malédiction. Et comment s’en sortir…

Abdelghani Dades

Abdelghani Dades

Coup de tonnerre, stupéfaction, incrédulité… aucun mot n’était trop fort pour décrire les sentiments des montréalais, ce lundi 17 juin 2013, avec l’annonce de l’arrestation par l’UPAC, du maire intérimaire de la Métropole.

Et pour cause! Celui qui avait pris la relève du trop bon M. Gérald Tremblay en novembre 2012 n’aura géré la Ville, en tout et pour tout, que pour une durée de sept mois. Durant ce cours laps de temps, il avait réussi à nous  persuader, tous autant que nous sommes, qu’il était «M. Propre», qu’il mettrait à profit l’année de son intérim (au terme de laquelle, il ne se représenterait pas) pour nettoyer les écuries d’Augias et laisser ainsi à ses successeur potentiels une cité gérable et sainement administrable.

Mais le voilà – toute présomption d’innocence respectée – potentiellement poursuivi sous quatorze chefs d’accusation dont notamment complot, fraude, corruption et abus de confiance.

Le choc est rude. Il va falloir maintenant procéder à la désignation d’un nouvel intérimaire; Qui ? Avec quelles perspectives sachant d’une part que l’UPAC annonce que «d’autres élus sont sous enquêtes» et d’autre part que le mandat du successeur de M. Applebaum ne pourra durer que quatre mois? Et surtout, pourquoi?

Car, entendons-nous bien : contrairement aux ambitions de M. Applebaum, un mandat intérimaire, dans l’esprit, n’a  généralement qu’une utilité : éviter une vacance institutionnelle et permettre, en octroyant une autorité limitée, de gérer, selon le lexique convenu du microcosme politique, «les affaires courantes».

Gérer les affaires courantes

On a trop vu en effet, en d’autres temps ou sous d’autres cieux, des intérims ou des courtes périodes de fins de mandats, mises à profit pour octroyer prébendes et  privilèges aux amis, «faire passer » en toute hâte des «dossiers» contestés et généralement contestables, multiplier toutes sortes de petits cadeaux d’adieux. Toutes cela, bien sûr, sans crainte du lendemain dans la mesure ou ces pratiques sont systématiquement  «couvertes» par une immunité de fait, puisqu’ en pareille situation on tolère toujours que les pages soient tournées et les livres fermés avec la fin du mandat et que les partants, ne puissent plus être imputables de rien une fois hors des affaires et qu’on laisse à la seule histoire la charge de les juger.

On pourra nous dire que de telles situation n’ont pas cours ici; Ouais; On croyait bien aussi jusqu’il y a quelques mois, que nos édiles, fonctionnaires, ingénieurs et entrepreneurs étaient tous, sans exception aucune,  d’honnêtes gens, de saintes gens, uniquement motivés, guidés et animés de saints soucis d’intérêt public.

Aujourd’hui, avec le recul, la frénésie d’action et de célérité qui s’est emparée des instances décisionnelles de la Ville ne peut plus être à nos yeux, qu’entachée de doutes et de soupçon.

Dès lors, redisons-le, le prochain nouveau maire intérimaire et ceux qu’il choisira pour le seconder dans ses tâches devra, obligatoirement se contenter de gérer les «affaires courantes». Cette conception stricte de son intérim devrait d’autant plus être sienne que nous sommes au seuil des vacances et que, dès la rentrée, la campagne électorale municipale occupera tout l’espace.

Il devra donc «mettre sur la glace» tous ces «grands dossiers» qui sont aujourd’hui en phase d’étude, en phase finale,  soumis à consultation publique ou autre.

Conditions d’éligibilité

Un maire intérimaire discret, cela nous aidera, en tant que citoyens, à panser nos plaies et mieux nous préparer aux échéances annoncées. Cela nous aidera aussi à mieux réfléchir aux conditions et exigences que nous poserons à ceux qui se préparent à briguer nos suffrages et demander notre confiance. Notamment en matière de transparence et de mode de gouvernance.

La gestion locale étant le premier degré de la politique, celui qui touche au plus près à la vie des citoyens, la transparence doit être totale. Toute l’information y afférent, dans ce qui est du ressort des élus comme dans ce qui est du ressort des fonctionnaires, doit être accessible à tous, en tout temps. Dans l’octroi des marchés publics par exemple, une fois les adjudications effectuées, et contrairement à la pratique ante, les cahiers de charges et de prescriptions, les différentes offres reçues et les procès verbaux des réunions techniques et décisionnelles devront devraient par exemple être rendus public.

De même, pour pallier une lacune incompréhensible, des outils de mesure d’efficience des politiques municipales devront absolument être mise en place. Aujourd’hui, en effet, on annonce toujours à grand bruit les projets engagés, promettant monts et merveilles; mais lorsque l’heure des bilans arrive, les communiqués deviennent aussi laconiques que peu significatifs.  Ils se résument à des formules du «Pour tel projet, nous avons dépensé tant d’argent; le programme ainsi financé concerne tant de citoyens; le maire s’est félicité de la réalisation de ce programme». Nous souhaiterions que désormais nous soit communiqué aussi, le nombre des citoyens pour lesquels le problème a effectivement été résolu, le nombre de ceux qui continueront à pâtir du problème abordé. Pour faire ce travail, et sans préjudice de l’action du Vérificateur de la ville, une structure interne de contrôle et d’évaluation, relevant directement du Maire, afin que plus jamais aucun maire ne puisse nous dire qu’il «n’était pas au courant».

De telles façons de faire, entre autres, ont été mises en place ailleurs (elles sont mêmes généralisées dans certains secteurs d’activité); leurs résultats ont été utiles et positifs et ils n’ont pas alourdi la gestion ou accru la bureaucratie. Pourquoi pas à Montréal dès lors?

Abdelghani Dades (Edito: Atlas.Mtl 208 du 20 juin au 3 juillet 2013)

 

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