À l’invitation du Festival Nuits d’ Afrique, Idir a animé une soirée mémorable le 15 Mars 2013 à la salle Olympia de Montréal, qui a permis à une large assistance de se remémorer les moments passés dans leur pays de naissance. Il a également réaffirmé la mission de sa Musique, qui est celle d’unifier les cœurs et d’être un messager de Paix.
En marge de sa performance, Idir à rencontré notre collaborateur Wahid Megherbi. Entretien.
Wahid Megherbi: Monsieur Idir, vos albums sont très rares, mais votre premier album Avaye Nouva, sorti en 1976, continue de marquer les esprits. Comment expliquez-vous ce succès qui reste gravé dans les cœurs et les esprits des gens?
Idir : On ne peut pas expliquer certaines choses qui arrivent, a un moment donné, a des oreilles qui sont prêtent à les recevoir. On réveille des gens avec des choses enfuies, qui ressortent à l’intérieur d eux-mêmes. La musique doit réveiller quelque chose chez eux ou peut-être la voix. On ne pas expliquer ce phénomène ; on ne peut que le constater.
Comment a évolué votre art depuis le son authentique Kabyle en passant par les expériences de fusion, avec Corneille, Goldman et Grand Corps Malade qui a écris pour vous « Lettre à ma fille» chanson mise en musique par votre fille Thalina?
C’est comme ca que je conceptualise la transmission de la mémoire, des mémoires. Je n’ai jamais voulu imposer à mes enfants leur identité. Ils vivent en France, ils étudient en France, leurs copains et copines sont en France. Ils vivent d’autres réalités. Je leur ai dis que votre père est Algérien, votre pays est l’Algérie. Voilà comment est votre pays et voilà sa musique. Voici ce qu’aime votre père et voici ce qu’il n aime pas. Je leur ais laissé le choix de bâtir leur vie. Ils ont, ainsi, choisi, librement la voix à suivre. Ma fille défend, bec et ongle, la culture en général et la musique berbère en particulier.
Qu’est-ce qui décrit le mieux l’originalité de la musique Kabyle, le son, la tonalité, la mélodie ?
La musique Kabyle n’a pas plus d’originalité que les autres musiques du monde. Il n’y a pas de recette particulière. Ce n’est pas parce qu’une chanson est chantée en Kabyle qu’elle réussit forcément. Vous connaissez la chanson algérienne de Feu Dahmane El Harrachi «Ya Rayah», qui a fait le tour du monde. Elle a été chantée en Arabe et c’est devenu un tube planétaire.
Vous une personne discrète malgré votre renommée mondiale, pourquoi ce choix de vie. Vous êtes, également, connu pour être un rassembleur ?
J’essaye d’être rassembleur le plus possible. Il ne sert à rien de rentrer dans des polémiques qui nous amènent vers des chemins complètement négatifs. Je connais mon Algérianité et mon Amazighité que je défends avec force. Je ne serai jamais quelqu’un que je ne suis pas. J’ai un destin qui est lié à une terre à un pays qui m’a vu naitre. Nous sommes dans un même territoire qui s’appelle l’Algérie, rassemblés avec un même destin pour avoir les mêmes droits et devoirs. Je veux que mon identité soit absolument la même que celles qui existent en Algérie. Il n’y a pas de raison qu’il y ait des Algériens moins Algériens que les autres.
Vous n’êtes pas seulement l’icône des Kabyles, mais vous êtes l’icône de tout un peuple . Ne pensez-vous pas que la nouvelle génération est davantage disponible à accepter cette diversité en Algérie ?
L’idéologie qui a prévalu après 1962 a mené nos dirigeants vers d’autres horizons. Les jeunes de ton âge sont décomplexés de ce coté la. Si je leur demande s’ils accepteraient qu’il y ait des Algériens moins que les autres, ils refuseraient sûrement. On arrivera, sûrement, à bâtir une Algérie qui s’accepte dans ses différences.
Quel est votre message aux Algériens et aux Maghrébins du Canada ?
Je m’adresse toujours à tous les Algériens. Je ne fais aucune discrimination entre eux. En 1962, on a recouvré notre indépendance. Une discrimination perdure et qu’on doit régler au plus vite. J’ai deux questions à poser, comment se fait-il que des gens qui ont combattu autant que d’autres et qui sont la depuis la nuit des temps ; On leur dénie le droit d être Algériens.
Mon message c’est d’aller ensemble vers le même chemin pour construire une Algérie qui s’accepte et qui ne fait pas de distinction entre ses fils en le traitant de la même manière.
Idir : Quatre albums et un renom universel
Idir, de son vrai nom Hamid Cheriet, né en 1949 en Algérie, dans le village d’Aït Lahcène dans la commune actuelle de Beni Yenni en Grande Kabylie, est un chanteur, auteur-compositeur-interprète et musicien.
Il ne se destinait pas à la chanson. Son nom d’artiste signifie d’ailleurs en berbère : « Il vit », nom traditionnellement donné à un enfant né difficilement, pour l’encourager à vivre. Mais un de ses premiers titres, A Vava Inouva devient rapidement un tube planétaire, dans les années 1970, le premier grand tube venu directement d’Afrique du Nord. Sa carrière est marquée par une irruption soudaine au premier rang, puis une éclipse volontaire d’environ une dizaine d’années à partir de 1981. Ses albums solo sont rares, quatre en quatre décennies. Mais l’œuvre d’Idir a contribué au renouveau de la chanson amazigh, et a apporté à la culture berbère une audience internationale.