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Le retour du hidjab… Comme si le microcosme politique québécois n’avait rien de réellement important à traiter!…

Tout juste après avoir été nommée ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest avait déclaré que le hidjab incarne à ses yeux «l’oppression des femmes».

La ministre Charest avait déclaré en réponse à une question en anglais qu’elle voyait dans le hidjab un signe « d’oppression ». Une position qu’elle a maintenue 24 heures plus tard  en ajoutant que « pour les femmes qui doivent le porter et qui se font dicter par la religion de le porter […] c’est un signe d’oppression. Maintenant, je sais qu’il y a des femmes qui décident de le porter. C’est leur choix et je le respecte ».

Les critiques de la ministre ont ainsi remis le port du hidjab au coeur de la joute politique, tout en rappelant à quel point le sujet est polarisant.

Les réactions aux propos de la nouvelle ministre de la Condition féminine ont fusé de toutes parts, au parlement. « C’est dommage d’entendre des propos qui divisent, de la part de la nouvelle ministre de la Condition féminine », a déploré la députée libérale Paule Robitaille en point de presse, en après-midi, tout en l’invitant à venir rencontrer des femmes voilées « épanouies » et « libres » dans sa circonscription de Bourrassa-Sauvé.

« Arriver en poste et avoir des propos aussi diviseurs sur une question aussi délicate, on a trouvé ça très maladroit de sa part », a quant à lui déclaré le co-porte-parole deQuébec Solidaire Gabriel Nadeau-Dubois.

Or ces nuances n’ont pas satisfait l’opposition. Seul le chef du Parti Québécois , Pascal Bérubé, n’a pas cherché à se distancer de ses propos. « Je dirais que s’il y a une pression religieuse, s’il y a une contrainte, c’est clair que c’en est un [symbole d’oppression]. »

Une position «personnelle»

Même au sein du gouvernement, on a voulu souligner qu’il ne s’agissait pas d’une position commune. « La ministre […] a exprimé son opinion personnelle», a réagi le ministre de l’Immigration, Simon Jolin-Barrette, qui est également responsable de la laïcité. « Le fait de porter des signes religieux, ça appartient aux individus, c’est un choix personnel, et moi, comme ministre responsable de la laïcité, le mandat que j’ai par rapport aux signes religieux, c’est d’interdire le port de tout symbole religieux, de quelque confession que ce soit, pour les personnes en situation d’autorité. »

D’autres ministres ont préféré ne pas se rallier publiquement à Mme Charest.

« Moi, personnellement, je n’ai pas à dicter ni aux femmes ni aux hommes comment s’habiller dans l’espace public », a dit la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, à l’entrée du caucus mercredi matin.

Quant au premier ministre, François Legault, il a laissé tomber brièvement qu’il n’allait pas « commencer à empêcher des ministres d’exprimer des opinions personnelles » et qu’il « fallait voir selon chaque personne ».

Rappelons que Mme Charest était aux côtés du premier ministre lorsqu’elle s’est fait demander ce qu’elle pensait du hidjab en tant que nouvelle ministre de la Condition féminine. « Ce sont des questions que je n’ai pas encore eu le temps de mettre en tête et de verbaliser », a-t-elle d’abord répondu.

Les journalistes lui ont alors demandé si à défaut de cela, elle avait une opinion personnelle sur le sujet. « Ça ne correspond pas à mes valeurs. Pour moi, ce n’est pas une façon pour une femme de s’épanouir », a-t-elle alors avancé. C’est par la suite en réponse à une question en anglais qu’elle a associé le hidjab à « l’oppression ».

Les féministes divisées

Ses propos ont suscité des réactions jusqu’à Ottawa. « Pour les femmes qui choisissent de le porter, c’est le signe d’un choix qu’elles exercent ici au Canada. Respectons cela », a affirmé la ministre fédérale de la Condition féminine, Maryam Monsef.

« Je ne peux pas me rallier à une affirmation comme ça », a quant à elle soutenu Marie-Claude Bibeau, ministre du Développement international. « Je comprends qu’il y a certaines Québécoises qui perçoivent ça comme un signe d’oppression, mais en même temps, pour moi, ce qui est fondamental, c’est le droit des femmes de choisir. »

Mais à l’extérieur de l’arène politique, certains n’ont pas hésité à défendre la nouvelle ministre.

« C’est quand même une obligation qui est imposée aux femmes qui doivent cacher leur chevelure lorsqu’elles sont en présence d’hommes qui ne sont pas de leur famille », a fait valoir Diane Guilbault du groupe féministe Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec), soulignant que c’est une position que partageaient des collègues originaires du Maghreb au sein de son groupe. « Une femme peut bien être médecin et dire qu’elle le porte par choix. D’accord. Mais ça n’enlève rien au symbole, à la signification du symbole lui-même », a poursuivi la présidente du groupe né en 2013 d’une scission avec la Fédération des femmes du Québec (FFQ) sur la question du voile, notamment.

À l’inverse, un autre groupe féministe, la Fondation Paroles de femmes, tenait un discours d’une autre nature. « On trouve ça très inquiétant parce que, selon le principe même de la laïcité, il faut que l’État s’abstienne d’interpréter les symboles religieux et de donner son avis », faisait valoir Amel Zaazaa, présidente de ce groupe créé dans la foulée de la charte des valeurs pour représenter les femmes racisées au Québec.

« Les femmes musulmanes qui portent le voile, elles vont se sentir moins en sécurité, ciblées par tous ces débats-là. […] Ce qu’il faut vraiment mettre en lumière, c’est que depuis quelque temps, il y a quand même une société civile qui est en train de dire non à ce débat. »

 

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