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Journal de campagne. 298 candidats aux 103 postes à pourvoir

Quelque 298 candidatures ont été déposées pendant la période de mise en candidature, qui s’est déroulée entre le 22 septembre et le 6 octobre, pour un total de 103 postes à pourvoir. C’est bien moins qu’il y a quatre ans, alors qu’Élection Montréal avait reçu pas moins de 485 candidatures.

Cette baisse s’explique peut-être par le fait qu’on assiste cette année bien plus à un duel qu’à une lutte à quatre, comme en 2013, alors que Coalition Montréal, dirigé à l’époque par feu Marcel Côté, et Vrai changement pour Montréal, dirigé par Mélanie Joly, avaient présenté des candidats dans presque tous les arrondissements, ce qui n’est pas le cas cette année.

Seuls deux sondages sur les intentions de vote ont été réalisés depuis le mois de juin. Les deux suggèrent que les Montréalais hésitent entre le maire sortant, Denis Coderre, et la chef de Projet Montréal, Valérie Plante. Six autres candidats sont néanmoins engagés dans la course à la mairie, dont Jean Fortier, de Coalition Montréal.

À mi-campagne, seul le maire sortant avait dévoilé sa plateforme électorale; celle de Projet Montréal était attendue d’un jour à l’autre. Les deux partis doivent également divulguer leur cadre financier. Denis Coderre s’est engagé à limiter les hausses de taxes foncières à l’inflation, tandis que Valérie Plante a promis, lorsqu’elle a lancé sa campagne, de baisser les taxes des familles, sans donner plus de détails. Jean Fortier prétend pour sa part pouvoir baisser les taxes de 10,5 % au cours des quatre prochaines années.

Grands projets vs qualité de vie

Si Denis Coderre mise surtout sur la continuité dans sa plateforme électorale, son adversaire de Projet Montréal a critiqué son bilan à de nombreuses reprises durant les dernières semaines. Elle lui reproche notamment de s’être engagé dans plusieurs projets colossaux sans que les citoyens en retirent quoi que ce soit, citant par exemple le championnat de formule E, disputé dans les rues du centre-ville cet été. « Le “bling bling”, je vais laisser ça à mon adversaire », a-t-elle résumé le soir de son lancement de campagne.

Valérie Plante, qui dit vouloir se concentrer sur la qualité de vie des Montréalais, demande notamment plus de transparence des organismes responsables des grands événements. Elle réclame aussi qu’aucune somme ne soit consentie au retour du baseball majeur sans que les Montréalais ne soient consultés – un souhait partagé par le parti provincial Québec solidaire, qui a tenté sans succès de faire adopter une motion en ce sens à l’Assemblée nationale.

À l’inverse, Denis Coderre maintient que la présence de Montréal sur la scène internationale est d’une importance capitale. Il plaide par exemple pour que l’Agence mondiale antidopage reste à Montréal et songe à permettre certains accommodements pour convaincre Amazon d’établir son deuxième siège social dans la métropole. Le maire sortant rappelle aussi dans presque tous ses points de presse les avantages de la loi sur le statut de métropole, adoptée la veille du déclenchement de la campagne, qui permettra à la Ville de réaliser sans l’autorisation de Québec de grands projets commerciaux, industriels ou résidentiels hors du centre des affaires.

Le projet de ligne rose, que Valérie Plante défendait déjà lors de la course à la direction de Projet Montréal, a également fait couler beaucoup d’encre. Le coût de construction de cette cinquième ligne de métro, qui relierait Montréal-Nord à Lachine en passant par le centre-ville, est estimé par la formation politique à un peu moins de 6 milliards de dollars et serait terminée pour 2028. Cette promesse semble d’ailleurs avoir inspiré Jean Fortier, qui propose quant à lui une nouvelle « ligne du savoir », qui relierait la station Côte-des-Neiges à l’École de technologie supérieure (ETS) par l’intermédiaire d’un tunnel sous le mont Royal.

« Est-ce que quelqu’un d’autre veut improviser une nouvelle ligne de métro, payée par Québec, durant cette campagne? », a ironisé sur Twitter le maire sortant de l’arrondissement de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, Russell Copeman, le 4 octobre. Son chef, Denis Coderre souhaite plutôt donner la priorité aux projets en cours, soit le prolongement de la ligne bleue jusqu’à Anjou et le Réseau de transport métropolitain (REM) de la Caisse de dépôt et placement du Québec, dont le projet de loi a été adopté dans les jours qui ont suivi le déclenchement de la campagne.

De nouveaux visages

Russell Copeman fait partie de ces recrues qui, comme Richard Bergeron, Réal Ménard, Elsie Lefebvre, Marc-André Gadouryet Érika Duchesne, ont rejoint l’Équipe Coderre après avoir été élus sous une autre bannière en 2013. Ces ajouts sont souvent mentionnés par le maire sortant, qui aime s’afficher comme un rassembleur. Denis Coderre a également enrôlé un certain nombre de « candidats vedettes », comme Cathy Wong, Hadrien Parizeau ou Marc-Antoine Audette, des Justiciers masqués – de nouveaux venus qu’il n’hésite pas à mettre en valeur.

De son côté, Valérie Plante rappelle souvent que Projet Montréal dirige deux arrondissements de plus qu’en 2013, puisque le maire du Sud-Ouest, Benoit Dorais, et celui de L’Île-Bizard–Sainte-Geneviève, Normand Marinacci, ont rallié sa formation dans la dernière année. Parmi ses nouvelles prises les plus notables, on compte aussi l’ex-journaliste Sue Montgomery, qui brigue la mairie de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, et l’ancien joueur de football Balarama Holness, qui vise celle de Montréal-Nord. Il fait d’ailleurs équipe avec Mathieu Léonard, dont le parcours peut étonner.

L’attention accordée à ces candidats est révélatrice d’un certain nombre de batailles à surveiller dans les arrondissements : celle dans Lachine, par exemple, où Denis Coderre s’est rendu au moins deux fois depuis le 22 septembre, ou celle dans Ahuntsic-Cartierville, où Valérie Plante s’est déplacée dès la première semaine de campagne pour dévoiler son plan en ce qui a trait au développement de l’ancienne fourrière municipale.

Les personnes âgées semblent aussi être un électorat des plus convoités par les chefs des deux partis, qui ont fait campagne le même jour dans des résidences pour personnes autonomes et semi-autonomes. Dans Verdun, Denis Coderre s’est engagé à créer un conseil des aînés, alors que dans Outremont, Valérie Plante a promis de rendre toutes les stations du métro universellement accessibles d’ici 2030.

Reconnaissant un certain déficit de notoriété, la chef de Projet Montréal a lancé, juste avant le déclenchement des élections, une campagne publicitaire indiquant qu’elle était « l’homme de la situation ». Elle multiplie depuis les entrevues dans les grands médias, apparaissant sur le plateau des Francs-tireurs et, dimanche prochain, de Tout le monde en parle. Valérie Plante souhaite du même coup défendre sa formation contre certaines perceptions selon lesquelles Projet Montréal est un parti idéaliste qui ne représente que les quartiers centraux de la ville.

Des promesses, des promesses…

Une campagne électorale ne serait pas une campagne électorale sans ses demi-vérités. L’équipe de La Vérif de Radio-Canada en a d’ailleurs débusqué quelques-unes depuis le début de la campagne.

Elle a notamment permis d’établir que Valérie Plante se trompe en affirmant que Montréal paie son asphalte deux fois plus cher que Toronto, alors que les coûts sont tout à fait similaires. Projet Montréal a également publié des informations erronées en laissant entendre que l’administration Coderre souhaitait n’acheter que 38 autobus au cours des quatre prochaines années, faisant fi des 100 autobus hybrides que la STM entend acquérir en 2018.

De son côté, le maire sortant n’a pas ajouté toutes les voies réservées aux autobus promises lors de la campagne de 2013; il n’a atteint que 46 % de son objectif.

Denis Coderre s’était déjà fait taper sur les doigts par Élection Montréal au premier jour de sa campagne, son parti ayant installé des affiches électorales place Vauquelin et ailleurs dans le Vieux-Montréal – un site patrimonial –, ce qui est strictement interdit par la loi électorale. Le soir même, le principal intéressé attribuait cet impair à « un surplus d’enthousiasme des bénévoles ».

On l’a aussi cherché dans le métro, que le maire sortant disait avoir pris deux semaines avant le déclenchement de la campagne électorale, ajoutant que les Montréalais avaient été nombreux à se prendre en photo avec lui. Alors que de nombreux journalistes fouillaient en vain les réseaux sociaux à la recherche desdites photos, M. Coderre s’est rendu dans le métro le 27 septembre en prenant bien soin de prendre un égoportrait en compagnie d’Aref Salem, son responsable des transports.

Des enjeux qui n’en sont pas

Enfin, plusieurs sujets controversés ayant fait les manchettes au cours des quatre dernières années ont été ignorés ou presque depuis le début de la campagne, à commencer par les régimes de retraite des employés municipaux, qui se sont pour la plupart entendus avec la Ville au cours des derniers mois, l’Assemblée nationale ayant décrété que les déficits passés seraient refinancés à parts égales entre les syndicats et les municipalités.

Il a été peu question, en outre, de l’interdiction d’acquérir de nouveaux chiens de type pitbull à Montréal, et ce, même si l’avocate Anne-France Goldwater et la lutteuse olympique Dorothy Yeats, qui militent activement contre le nouveau règlement de la Ville, ont apporté leur soutien à Projet Montréal.

L’avenir des calèches dans le Vieux-Montréal, les inondations printanières et la commission Chamberland sur la protection des sources journalistiques font aussi partie des thèmes passés sous silence ces trois dernières semaines. Il en reste trois autres pour en débattre d’ici le 5 novembre.

Atlas.Mtl

 

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