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Devoirs de vacances

Devoirs de vacancesAprès 44 ans de règne sans partage, le parti au pouvoir par en débandade en Alberta; en Grande Bretagne, pour la première fois depuis les années 70, la campagne électorale ne laisse deviner aucune tendance jusqu’au jour du vote et les résultats des élections législatives  ne dessinent aucune majorité, le tout aux détriments du parti du Premier ministre sortant…

Et dans les deux cas, des revers et des bastions de la pensée conservatrice qui s’écroulent ou vacillent.

Une différence toutefois.

En Alberta, il peut y avoir un «effet pétrole» dans le revers subit par M. Jim Prentice; avec la baisse des cours de l’or noir, les albertains ont ainsi pu chercher à se prémunir d’une politique de rigueur dont ils auraient pu avoir à souffrir, en appelant à la tête de la province des socio-démocrates à priori moins portés sur les coupes budgétaires et plus favorables aux filets sociaux.

En Grande Bretagne en revanche, le «ballotage défavorable» auquel à été soumis M. David Cameron intervient au moment même ou les fondamentaux économiques semblaient se remettre au vert et promettre, comme s’y était engagé le Premier ministre sortant, une politique sociale à tout le moins, moins restrictive.

La droite au rancart?

Faudrait-il alors voir dans ces virages autre chose que la seule sanction de politiques économiques, par exemple un essoufflement du courant de droite – et aussi, souvent, d’extrême ou d’ultra droite – qui, depuis la fin des années 80 se propageait à travers l’Occident?

Le recul en Grande Bretagne du UKIP de Nigel Farrage, si l’on en juge par son parti-pris anti-immigration et anti-européanisme (ce qui n’est pas sans rappeler des temps anciens, lorsque campée sur sa santé économique la Grande Bretagne, voulait, au titre d’une politique dite de l’«isolation superbe», s’ériger en place fortifiée indépendante du et indifférente aux heurs et malheurs du reste du monde), pourrait laisser penser que oui.

Sauf que le parti travailliste de M. Ed Milliband, qui promet un peu moins d’équilibres globaux et un peu moins de précarité économique individuelle, n’a pas non plus réussi à rallier les suffrages qui lui auraient donné une majorité. Raison «officielle» : s’il doit gouverner, il fera – shocking! – avec l’appui de l’alter ego de notre Bloc Québécois, le parti indépendantiste écossais (Scottish National Party).

Quelle signification accorder alors aux résultats des consultations albertaine et britannique? Il y en a une, sans aucun doute. Mais n’oublions pas que tout ce que l’on voit au sortir des urnes n’est, en général, que la partie visible de l’iceberg.

Il faudra dès lors attendre encore un peu; attendre la publication des taux de participation, les analyses des choix de vote des uns et des autres, pour savoir si, en Occident, les peuples ont effectivement commencés à sortir de l’égoïsme, si les spectacles de peines et de misères dont ils sont témoins tous les jours, chez eux, en Grèce, dans nombre de pays d’Afrique et d’Orient, en Méditerranée et ailleurs.

Le rendez-vous de l’automne

En quoi tout cela nous regarde-t-il?

Deux raisons.

C’est encore tout frais dans nos mémoires : le 1er mai. Nous ne l’avons peut-être pas fêté, mais nous avons tous pensé à sa signification et à ses objectifs; ce qui signifie que le droitisme n’est pas notre «cup of tea».

Et de deux : nous allons voter dans quelques mois, en octobre. Pour dire nos choix, exprimer notre volonté de vivre mieux, notre solidarité avec nos concitoyens et avec le reste du monde.

Et nous serons, selon toute vraisemblance, devant des choix aussi difficiles que ceux des citoyens britanniques.

Y répondrons-nous comme ils l’ont fait, en nous donnant un gouvernement minoritaire, qui n’exprimera que notre incertitude collective; y répondrons-nous comme les albertains, en choisissant le changement quoi qu’il puisse coûter lorsque les promesses devront devenir des actes de gouvernement et que la réalité viendra forcer la modulation de ces promesses ?

C’est là l’énoncé de nos devoirs de vacances. Pensons-y, dès maintenant…

Abdelghani Dades (Édito: Atlas.Mtl 253 du 7 au 20 mai 2015)

 

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