Commentaires fermés sur Entrtien: Thomas Mulcair. chef de l’Opposition officielle : «La Loi sur la citoyenneté nécessite des réformes ce qui est proposé change complètement les règles du jeu»

Entrtien: Thomas Mulcair. chef de l’Opposition officielle : «La Loi sur la citoyenneté nécessite des réformes ce qui est proposé change complètement les règles du jeu»

Entrtien: Thomas Mulcair. chef de l’Opposition officielle : «La Loi sur la citoyenneté nécessite des réformes ce qui est proposé change complètement les règles du jeu»

Thomas Mulcair. chef de l’Opposition officielle

Présenté par le gouvernement comme «l’une des premières réformes d’envergure de la Loi sur la citoyenneté depuis 1977», le projet de loi C-24 qui rend plus difficile l’acquisition de la citoyenneté et sa perte plus facile, n’est de ce fait, semble-t-il, que le début d’un processus dont on ne voit encore ni les tenants, ni les aboutissants et à propos duquel d’ailleurs, les informations ont été parcimonieuses.

Cette discrétion, alors que le feuilleton à commencé en février dernier, ont fait que nous n’avons depuis lors rien publié ou commenté. Nous devons à la vérité de dire que ce sont les députés de l’opposition officielle, formée par le Nouveau Parti Démocratique (NPD), qui ont attiré notre attention sur les dangers portés par le texte. Et c’est au plus haut niveau du parti, son chef M. Thomas Mulcair, qu’on nous a répondu lorsque nous avons demandé des commentaires sur cette question. Entretien.

Question: Bonjour M. Mulcair. Tout d’abord merci de nous accorder un peu de votre temps pour parler de la réforme de la Loi sur la citoyenneté. À la mi-juin, les conservateurs ont utilisé leur majorité pour faire adopter leur projet de loi C-24 sur l’immigration. Le ministre Chris Alexander a déclaré que ce projet représente l’une des premières réformes d’envergure de la Loi sur la citoyenneté depuis 1977. Le Nouveau Parti démocratique s’est vigoureusement opposé à ce projet de loi. Pourquoi?

Thomas Mulcair: Tout le monde s’entend pour dire que la citoyenneté canadienne revêt une valeur considérable, mais il est inadmissible selon nous d’instrumentaliser cette question, de la politiser pour obtenir des bénéfices politiques et de plaire aux partisans conservateurs. Cela s’est produit trop souvent depuis 2006 et c’est ce à quoi on assiste à nouveau aujourd’hui.

Qu’est-ce qui vous fait dire cela ? 

Les conservateurs ont refusé de nous écouter et d’écouter les nombreux experts qui ont tenté de corriger les grandes faiblesses de leur réforme. Ils ont refusé tous les amendements proposés à la Chambre des communes. Ils ont coupé court aux débats en plus d’ignorer les processus normaux du comité de l’immigration.

La Loi sur la citoyenneté nécessite des réformes parce qu’il y a des failles dans le système actuel, mais les articles proposés par les conservateurs changent complètement les règles du jeu et nous nous devons de les dénoncer.

Nous espérions que le ministre s’engage à travailler en collaboration avec nous pour réellement améliorer nos lois en matière d’immigration, mais il a choisi d’aller de l’avant avec un projet de loi fort probablement anticonstitutionnel.

Qu’est-ce qui, selon vous, ne va pas avec cette réforme? 

Plusieurs éléments! Les articles visant à concentrer le pouvoir entre les mains du ministre m’inquiètent tout particulièrement.

Que voulez-vous dire ? 

Cette loi concentre beaucoup de nouveaux pouvoirs directement entre les mains du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration. Il peut maintenant révoquer la citoyenneté canadienne aux détenteurs d’une double citoyenneté. Donner ce genre de pouvoir à une personne, c’est lui offrir la possibilité de prendre des décisions arbitraires. Au NPD, nous condamnons ce genre de pratique.

Mais ce nouveau projet de loi devrait réduire les délais d’attente? Un important problème pourrait être ainsi résolu… 

En effet, c’est un problème de taille. Les délais n’ont jamais cessé d’augmenter depuis l’arrivée au pouvoir des conservateurs. Malheureusement, C-24 ne réglera pas la situation. Il ne prévoit aucune solution réelle pour réduire les retards et les délais de traitement des demandes de citoyenneté. Les conservateurs proposent essentiellement de réduire les intermédiaires dans le traitement des dossiers. Pourtant, rien ne prouve que cette modification administrative sera suffisante pour réduire significativement les temps d’attente. En 2013, leur plan d’action prévoyait 44 millions sur deux ans pour régler ce problème: Plus de 320 000 personnes attendent toujours de voir leur demande être traitée et les délais sont aujourd’hui de 31 mois. C’est 15 mois de plus qu’en 2009!

Il s’agit clairement du plus important problème de notre système actuel de citoyenneté et jusqu’à maintenant, force est de constater que les conservateurs ont échoué à le régler.

Cette réforme rendra plus difficile pour les immigrants de répondre aux exigences relatives à l’attribution de la citoyenneté, notamment pour les étudiants étrangers. Dans l’actuelle loi, le temps passé au Canada avant l’obtention de la résidence permanente pouvait être comptabilisé dans le calcul de l’obligation de résidence au Canada, qui est utilisé comme critère pour l’obtention de la citoyenneté. Maintenant, la durée du séjour au Canada des résidents non permanents n’entrera plus en ligne de compte. Leur plan de vie pour devenir citoyens canadiens et contribuer à la société sera d’autant repoussé.

Beaucoup d’intervenants ont remis en doute la constitutionnalité même de ce projet de loi. Vous en pensez quoi? 

Tel qu’adopté, le projet de loi à des failles majeures et comme vous l’avez mentionné, nous ne sommes pas les seuls à le dénoncer. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), par exemple, s’est publiquement inquiété des impacts négatifs que le projet de loi pourrait avoir sur «les droits et le bien-être de groupes d’enfants particulièrement vulnérables». Amnistie internationale a, pour sa part, relevé les «nombreux accrocs aux droits humains» qu’il présente.

De son côté, l’Association du Barreau canadien a ouvertement laissé entendre que C-24 pourrait menacer certains droits fondamentaux protégés par la Charte canadienne des droits et libertés et qu’il serait donc, comme d’autres projets de loi conservateurs déposés avant lui, inconstitutionnel.

L’Association du Barreau canadien, UNICEF, l’Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés, Amnistie Internationale, le Conseil canadien pour les réfugiés, le Constitutional Rights Centre et de nombreux universitaires chevronnés ont tous indiqué que ce projet de loi ne respecte pas la Charte ou les engagements internationaux du Canada. Le Constitutional Rights Centre a d’ailleurs déposé une contestation de la constitutionnalité de C-24 devant les tribunaux.

Je pense qu’il est inacceptable de ne pas écouter nos experts et de réduire les droits des minorités.

Pouvez-vous nous donner un exemple de mesure qui ne serait pas constitutionnelle?

Le projet de loi rend possible la révocation de la citoyenneté comme conséquence pénale pour les personnes détenant une double citoyenneté. Il y a plusieurs problèmes juridiques avec une telle mesure. Premièrement, nous ne pouvons pas traiter les personnes ayant une double citoyenneté différemment en les exposant à la perte possible de leur statut. Il s’agirait d’une sanction additionnelle à leur sentence pénale. Un système avec deux poids, deux mesures donc et qui soulève clairement des questions constitutionnelles.

En gros, que voudrait le NPD? 

Nous croyons à un système d’immigration équitable, efficace, transparent et responsable. Le gouvernement ne devrait donc pas adopter des mesures d’immigration de plus en plus restrictives fondées sur des décisions arbitraires prises derrière des portes closes.

Depuis 2008, plus de 25 changements importants ont été apportés aux méthodes, aux règles, aux lois et aux règlements relatifs à l’immigration. Nous n’avons qu’à penser au moratoire sur le parrainage pour parents et grands-parents, à la diminution de la réunification des familles, à la punition des réfugiés vulnérables et à l’augmentation du nombre de travailleurs étrangers temporaires. Les changements considérables que les conservateurs ont apportés au système d’immigration canadien n’ont amélioré ni l’efficacité ni l’équité du système.

Nous croyons qu’il faut des mesures concrètes pour la réunification des familles, je pense sincèrement que cela devrait figurer au sommet des priorités de la politique canadienne en matière d’immigration.

Et pour revenir aux aspects liés à la constitutionnalité, nous reconnaissons bien entendu que les citoyens ayant commis des actes criminels doivent être tenus responsables de leurs gestes, par contre, nous croyons à notre système juridique et nous pensons que tous les citoyens doivent avoir droit à un traitement juste et équitable aux termes de la loi.

Le droit canadien comporte déjà des mécanismes permettant de punir les gens qui commettent des actes illégaux. Il ne devrait pas revenir au ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration de prendre ces décisions si nous ne voulons pas de débordement.

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